24 septembre 2025. La commission des Affaires sociales de l’Assemblée nationale, présidée par le député de Fontainebleau (Seine-et-Marne) Frédéric Valletoux, membre du parti Horizons, a auditionné les responsables des quatre principaux fabricants de cigarettes en France, dont Marine Sauce, responsable des Affaires réglementaires de Japan Tobacco International France, au sujet de la situation du tabac, de ses alternatives et du marché parallèle.
Selon Marine Sauce, de Japan Tobacco International France, lors de l’audition : « Le commerce parallèle est un véritable fléau national. Une cigarette sur deux est achetée en dehors du réseau des buralistes, dont 15% environ sont attribuables à la contrefaçon. La France se distingue assez tristement au sein de l’Union européenne puisqu’elle représente à elle seule 50% du commerce illicite de tabac. Une fois ce constat présenté, la véritable question, et celle qui nous réunit aujourd’hui, est quels sont les facteurs déterminants de ce commerce illicite et comment s’attaquer à la racine du problème ? Il y a, d’abord et avant tout, la question du prix, qui s’explique par une politique fiscale agressive ininterrompue depuis une vingtaine d’années. Le prix de la marque la plus vendue de cigarettes est ainsi passé de 4 à 13 euros en 20 ans et ce dernier continuera vraisemblablement d’augmenter l’année prochaine du fait de l’inflation et de l’écotaxe sur les mégots. L’actualité récente illustre parfaitement les dérives de cette fiscalité punitive. Prenons l’exemple de Carklop, cette plateforme de particulier à particulier, lancée un peu plus tôt ce mois-ci avec pour seul et unique but d’acheter son alcool et ses cigarettes moins chers. Donc, cet exemple, comme beaucoup d’autres, nous montre une chose. Les faits sont sans appel : en augmentant le prix, on ne tue pas la demande, on la déplace. Donc, cette augmentation vertigineuse du prix a eu plusieurs effets. Elle a tout d’abord créé une amplitude considérable avec les pays voisins. Cet écart de prix couplé à un contexte de libre circulation des marchandises fait de la France un pôle d’attraction du tabac illicite, alimentant le crime organisé, des importations à grandes échelles et des opérations de contrefaçon. C’est un constat largement partagé par Europol. Pour quels résultats, pour quels effets sur la consommation de tabac ? L’impact est marginal. La prévalence tabagique était de 25,5% en 2020 et reste à un niveau élevé de 23,1% en 2023. Donc, ce que nous préconisons est un changement de paradigme, un changement d’approche qui s’attaque notamment à la question du prix de manière franche et réaliste. Tous ne relèvent bien évidemment pas des pouvoirs publics. JTI prend, de son côté, des mesures concrètes pour lutter contre ce phénomène. Nous renforçons et sécurisons notre chaîne d’approvisionnement via des investissements importants. Nous collaborons également fortement avec les forces de l’ordre et les gouvernements. À titre d’exemple, depuis le début de l’année 2025, JTI a contribué au démantèlement de sept sites de production illicite en Europe et en Ukraine. Ces sites représentaient environ 4,1 milliards d’unités par an. La France figurerait parmi les principaux pays touchés par ces sites de production illicite. Maintenant, demain, et sur le protocole de l’OMS pour éliminer le commerce illicite de ces produits du tabac, nous ne sommes bien évidemment pas opposés aux objectifs du protocole pour des raisons évidentes. Nous regrettons cependant que ce dernier ne s’attaque pas à la cause du problème et se concentre davantage sur les symptômes. C’est pourquoi, là encore nous préconisons une approche différente en agissant directement sur les réseaux de contrebande, plutôt qu’en multipliant les contraintes administratives sur les opérateurs légaux. Comme l’a mentionné mon homologue, on ne parle plus aujourd’hui uniquement de marché du tabac, mais de plus en plus d’un marché des produits nicotiniques. Et s’agissant de ces produits nicotiniques, le cadre réglementaire est inadapté et à la fois incomplet et prohibitionniste. Les cigarettes électroniques comme les sachets de nicotine peuvent aujourd’hui être vendus en ligne en dehors du monopole des buralistes, ce qui complexifie à la fois le contrôle de la chaîne d’approvisionnement et la lutte contre les trafics. Il est donc essentiel de mettre en place un cadre réglementaire strict et équilibré pour protéger les consommateurs, plutôt que d’interdire et ainsi de les livrer à des produits non réglementés. L’exemple des puffs est parlant. L’interdiction pure et simple a contribué à créer un marché parallèle aujourd’hui. Il suffit d’un clic sur Internet ou d’un passage en épicerie de nuit pour s’en procurer. Donc, concrètement, nous appelons à des solutions pragmatiques : sortir d’une logique purement fiscale qui creuse l’écart avec nos voisins et alimente les trafics ; renforcer les moyens de contrôle et cibler directement les réseaux criminels ; et, enfin, étendre cette approche à l’ensemble des produits nicotiniques en privilégiant la régulation à la prohibition. »
Marine Sauce, responsable des Affaires réglementaires de Japan Tobacco International France